Open access : from right to duty

Dear researcher,

I know you well enough because I’ve been around you for many years in labs, congresses, family dinners and – a little less since you’ve been reading everything online – in libraries.

Infant spinal muscular amyotrophy is a degenerative neuro-muscular disease. I have the honour of knowing it quite intimately, because my daughter suffers from it. So, as a family of sick people, a member of an association of sick people, I need the science you produce on public funds to be online, so that I and my friends can read it, understand it, fiddle it in order to get the best out of it and be able to talk with the medical teams, researchers, labs… I’m talking to you with my narrow view of things, but everyone can have their own, which will concern their own scientific field.

I happen to be also an academic librarian and have been working for a long time to promote open access.

As a result, I am well aware of your reluctance to deposit your articles in the repositorie of your university.

Those words comes up often, very often in our talks :

« I don’t have time, I’m sure I don’t have the right, and then you know, I’m already putting my articles on researchgate and/or academia. »

Let me try to show you things differently :

I don’t have time : yes, your time is running out, mine too by the way. Will you make me believe that 5 minutes to deposit an article is a lot, compared to the hours of work he asked you for? Maybe you publish one or two articles a year, so we’re talking about 10 minutes a year of your life as a researcher, 10 minutes to open up science to citizens, to move on it, that’s too much? Can’t you consider that the communication and thus the promotion of your publication is an integral part of the scientific process and therefore naturally integrate these few minutes ?

I don’t have the right : most publishers give the right to deposit their publications in repositories, easily verifiable on the sherpa-romeo site. And more and more countries are adopting laws or texts that confirm this rights : France, Germany, Europe, United States federal agencies

Researchgate and/or Academia : wow there, danger: these social research networks have unclear conditions of use, still enough to know that depositing an article on their site is giving them worldwide and exclusive rights. Is that really what you want? In addition, you often tend to deposit the final version of your article, which is edited by the publisher. And it’s starting to annoy them seriously, the publishers. I advise you to use these sites as a social network but not to upload your productions.

And consider well, if none of these arguments have convinced you, that making your science open is better to circulate it and in the end, increase its citability by 30% ! Not bad, huh?

Let’s recap: you can take the time, you have the right and you know the contraindications of social research networks. You know an open-access publication is more cited. Then, use the institutional repositories that are proposed to you by universities and research organizations, to put your research in open access in a sustainable and secure way. Open up the science you have produced to the citizens who have co-funded it and need it, so that it may help them to advance their knowledge and irrigate society.

I have an idea : why don’t you make it your duty to fulfill this noble task?

Thanks a lot to you.

Lettre aux chercheurs : open access, du droit au devoir

Cher chercheur,

Je me permets de te tutoyer car je te côtoie depuis de nombreuses années dans les labos, congrès, repas de famille et – un peu moins depuis que tu lis tout en ligne – dans les bibliothèques.

L’amyotrophie spinale infantile est une maladie neuro-musculaire dégénérative. J’ai l’honneur de la connaître assez intimement, car ma fille en est atteinte. Du coup, en tant que famille de malade, membre d’une association de malades, j’ai besoin que la science que tu produits sur fonds publics soit en ligne, que moi et mes copains de galère, on puisse la lire, la comprendre, la triturer pour en tirer le meilleur et pouvoir discuter avec les équipes médicales, chercheurs, labos … Je te parle de mon bout de lorgnette, mais chacun peut avoir le sien, qui concernera divers domaines de la science.

Il se trouve que je suis aussi bibliothécaire dans l’enseignement supérieur et que je travaille depuis longtemps pour promouvoir l’open access.

Du coup, je connais bien tes réticences à déposer tes articles dans des archives ouvertes comme HAL, SAM, ou d’autres.

Cette phrase revient souvent, très souvent dans nos discussions :

« j’ai pas le temps, je suis sûr que j’ai pas le droit et puis tu sais, je mets déjà mes articles sur researchgate et/ou academia »

Permets-moi d’essayer de te montrer les choses différemment :

J’ai pas le temps : oui ton temps est compté, le mien aussi d’ailleurs. Vas-tu me faire croire que 5 minutes pour déposer un article c’est beaucoup, comparé aux heures de travail qu’il t’a demandé ? Peut-être publies-tu un ou deux articles par an, on parle donc de 10 minutes annuelles de ta vie de chercheur, 10 minutes pour ouvrir la science aux citoyens, la faire circuler, c’est trop ? Ne peux-tu pas considérer que la communication et donc la valorisation de ta publication fait partie intégrante du processus scientifique et donc y intégrer naturellement ces quelques minutes ?

J’ai pas le droit : en France, la Loi pour une République Numérique te donne le droit, par son article 30, de déposer le post-print de ton article, et ce depuis le 8 octobre 2016 : toutes les explications sont , ou . Alors, plus d’hésitation de ce côté là.

Researchgate et/ou Academia : ouh là là, danger : ces réseaux sociaux de recherche ont des conditions d’utilisations peu claires, suffisamment quand même pour savoir que déposer un article chez eux, c’est leur en donner les droits mondiaux et exclusifs. Est-ce  vraiment ce que tu souhaites ? En plus, tu as souvent tendance à y déposer la version finale, mise en page par l’éditeur, de ton article. Et ça commence à les agacer sérieusement, les éditeurs. Je te conseille plutôt d’adapter les judicieuses recommandations de l’équipe IST de l’INRA, en utilisant ces sites comme réseau social mais sans y déposer tes productions.

Et considère bien, si aucun de ces arguments ne t’as convaincu, que rendre ta science ouverte, c’est mieux la faire circuler et au final, augmenter sa citabilité de 30% ! Pas mal non ?

Récapitulons : tu peux prendre le temps, tu as le droit et tu connais les contre-indications des réseaux sociaux de recherche. Tu sais qu’une publication en accès ouvert est plus citée. Alors, utilise les outils institutionnels qui te sont proposés par les universités, grandes écoles, organismes de recherche, pour mettre ta recherche en accès ouvert de manière pérenne et sécurisée. Ouvre la science que tu as produite aux citoyens qui l’ont co-financée, afin qu’elle les fasse avancer dans leurs connaissances et qu’elle irrigue la société.

J’ai une idée : et si du coup tu te faisais un devoir de remplir cette noble tâche ?

Merci à toi.

 

 

 

 

Projet stratégique des bibliothèques Arts et Métiers

En 2015, nous avons établi un projet stratégique pour les bibliothèques des Arts et Métiers.

Ce projet, basé sur le projet stratégique de l’établissement, représente une base commune pour les projets en cours et à venir dans les bibliothèques des campus.

Il décrit nos valeurs et les enjeux de bibliothèques aujourd’hui dans une école d’ingénieur.

Je le pose ici, vos avis sont les bienvenus.

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Bibliothèques académiques et archives ouvertes : quels enjeux en France ?

Voici le chapitre que j’ai écrit pour le livre « Bibliothèques universitaires : nouveaux horizons » qui vient de paraître au Cercle de la Librairie. La condition initiale pour que j’accepte d’écrire ce chapitre était que je puisse le déposer en open access. Elle a été intégrée dans le contrat éditeur pour la « version de travail ». Voici donc cette version.

Bibliothèques académiques et archives ouvertes : quels enjeux en France ?

Introduction

Dans un contexte de crise économique mondiale, d’inégalités entre les hommes pour l’accès aux résultats de la science, l’accès ouvert[1] aux résultats de la recherche est devenu un enjeu important des politiques scientifiques publiques. Quels rôles jouent les bibliothèques académiques[2] dans la diffusion des résultats de la science en accès ouvert ? Comment se sont-elles emparées des archives ouvertes et quels sont les résultats de leurs actions ? Quelles compétences ont-elles à mettre en œuvre pour promouvoir l’accès ouvert aux résultats de la recherche des établissements d’enseignement supérieur ? Tels sont les questions auxquelles nous essaierons d’apporter des éléments de réponse dans ce chapitre, en nous attachant à la situation en France.

Un rapide historique

Les fondements de l’accès ouvert sont énoncés dans « L’initiative de Budapest pour l’accès ouvert » en 2002 qui en pose les définitions. L’idée est de combiner la volonté des chercheurs de voir circuler leurs publications et les possibilités offertes par internet pour proposer la mise à disposition en ligne, gratuitement et sans restriction, à ces publications. L’appel est signé par seize personnes, chercheurs et représentants de l’Open Society Institute. Il vise à lever les obstacles vers l’accès libre pour « construire un futur dans lequel recherche et éducation soient beaucoup plus libres de s’épanouir dans toutes les parties du monde »[3] [INI2004]. Les chercheurs sont majoritaires parmi les signataires de cette déclaration dans laquelle les bibliothécaires sont présents par l’intermédiaire de l’association académique SPARC[4].

En 2003, la Déclaration de Berlin est signée, qui permet à plusieurs pays et institutions d’adhérer aux principes d’une « représentation générale et accessible du savoir ». Cette déclaration met particulièrement l’accent sur le fait que la dissémination des résultats de la recherche fait partie intégrante du processus de recherche. Aujourd’hui, alors que la onzième conférence de Berlin a eu lieu en 2013, 480 institutions dans le monde en sont signataires.

Les chercheurs ont été très tôt à l’initiative d’archives en ligne thématiques (ArXiv, Cogprints, REPEC…[5]) toutes crées dans les années quatre-vingt-dix. Ainsi, Steven Harnard, a publié en 1994 sa « proposition subversive », « incitant tous les auteurs et leurs institutions à prendre exemple sur l’expérience des physiciens et à déposer leurs prépublications sur un serveur » [BOS2005]. Ces initiatives sont bâties sur le modèle historique de la communication savante, et construisent des sites de communication directe des résultats de la recherche entre chercheurs.

Plusieurs initiatives constituent alors les débuts des archive ouvertes, en France avec le Centre pour le Communication Scientifique Directe (CCSD) du CNRS, aux Etats-Unis avec Pubmed Central[6], en Allemagne avec eDoc[7], au Brésil avec la création du portail national Scielo.[8] Néanmoins, ces archives dispersées ne permettaient pas une recherche d’information à grande échelle. La création du protocole OAI/Open Archives Initiative en 1999, qui permet de rechercher, naviguer et moissonner les archives de manière simultanée en les rendant interopérables, vise à résoudre ce problème. Il vise à moissonner les métadonnées des publications et non leur texte intégral, afin de pallier aux nécessités d’espaces disques importants qu’impliquerait une réplication des textes des publications. Ce protocole va permettre au mouvement des archives ouvertes de se développer, sur la base de logiciels open source créés dans les années 2000 : eprints à l’Université de Southampton puis Dspace au Massachusetts Institute of Technology (MIT). Dspace a été créé en 2002 en partenariat avec Hewlett-Packard (HP) dans un but de collecte et de conservation des publications numériques des chercheurs du MIT. L’accès ouvert n’est pas clairement évoqué au moment de son développement. Grâce à la création de ces logiciels, l’implication des bibliothécaires dans le processus se développe.

Ces bases de données sont au départ des outils de collecte, classification, archivage, préservation des publications académiques d’une institution. Elles prendront le nom d’Open Access Repository ou d’archive ouverte après la déclaration de Berlin, à partir de 2003.

L’Association of Reserach Libraries (ARL) aux Etats-Unis, la Ligue européenne des bibliothèques de recherche (LIBER) en Europe, organisent alors les premières journées d’études sur le sujet. En France, Hélène Bosc est une des premières bibliothécaires à s’emparer de la question et elle construit l’archive ouverte « physiologie animale » à l’Insitut national de recherche agronomique (INRA) en 2002 [BOS2004].

C’est lors de la conférence Berlin 3 en 2005, que les signataires s’engagent à adopter une politique exigeant que leurs chercheurs déposent dans une archive ouverte institutionnelle (AOI) tout en encourageant les chercheurs à publier dans des revues en libre accès quand elles existent.

Aujourd’hui, si plus de 2600 dépôts d’accès ouvert existent dans le monde[9], leur visibilité auprès des chercheurs et du grand public reste faible. D’après Eloy Rodrigues, Directeur des Services de documentation de l’Université de Minho, les trois quarts des accès aux articles des archives ouvertes se font par l’intermédiaire de Google Scholar [POY2014]. De plus, l’interopérabilité entre les dépôts se heurte à la diversité des types de documents déposés (articles, documents multimédias, ensemble de données), à celle des disciplines et de leur référencement, et enfin au multilinguisme. Enfin, les dépôts d’articles en texte intégral représentent un pourcentage relativement faible des dépôts, environ un tiers en moyenne. Il y’a donc encore beaucoup à faire pour rendre effective l’appropriation de ces dépôts, tant par les chercheurs en tant qu’auteurs déposant leurs publications que par les lecteurs.

Les modèles de l’accès ouvert

Dès la déclaration de Budapest, l’accès ouvert a été décliné en deux « stratégies complémentaires », qui seront structurées par la suite et identifiées sous la forme des modèles « green open access» pour l’auto-archivage et « gold open access» pour la publication dans des revues alternatives :

« I. Auto-archivage : en premier lieu, les savants ont besoin d’outils et d’assistance pour déposer leurs articles de revues à comité de lecture dans des archives électroniques ouvertes, une pratique communément appelée auto-archivage. Lorsque ces archives sont conformes aux standards définis par l’Open Archive Initiative des moteurs de recherche et autres outils peuvent traiter des archives distinctes comme un seul et unique fonds d’archives. L’utilisateur n’a alors plus besoin de savoir quelle archive existe, ni où elle est localisée, pour accéder à son contenu et l’utiliser.

  1. II. Revues alternatives : en second lieu, les savants ont besoin des moyens pour lancer une nouvelle génération de revues alternatives engagées dans le libre accès et pour aider les revues existantes qui choisissent d’opérer la transition vers l’accès libre. Puisque les articles de revues devraient être diffusés aussi largement que possible, ces nouveaux périodiques n’invoqueront plus le droit d’auteur pour restreindre l’accès et l’utilisation du matériel qu’ils publient. Puisque le prix constitue un obstacle à l’accès, ces nouvelles revues ne factureront pas l’abonnement ou l’accès, et se tourneront vers d’autres méthodes pour couvrir leurs frais [….].

Nul besoin de favoriser une solution plutôt qu’une autre pour toutes les disciplines et toutes les nations, ni d’arrêter de chercher de nouvelles alternatives originales » [INI2004].

Les éditeurs, après une période de frilosité, on rapidement adapté leurs politiques éditoriales à l’émergence de l’accès ouvert en jouant sur les deux stratégies. Ils ont ainsi pour la plupart rendu publiques leurs politiques par rapport au green open access, regroupées sur le site Sherpa/Romeo[10]. Ils ont rapidement créé la notion d’embargo, période durant laquelle un chercheur ne peut pas rendre publique la version de sa publication revue par les pairs. Quand des embargos existent, leur durée est de six mois à un an pour les revues en sciences, techniques et médecine, jusqu’à trois ans pour certains éditeurs en sciences humaines et sociales. D’autre part, ils ont créé la notion de « revue hybride » dans laquelle le chercheur peut choisir de rendre public son article dès sa publication, moyennant le paiement d’un « coût auteur par article » (article processing charge ou APC). Ce système induit une double facturation pour l’accès à la revue et pour l’article. Selon une étude [SOL2012] publiée en 2012, un article coûte en moyenne 904 $, soit 681 €, avec une fourchette de prix allant de 8 $ à 3900 $.

Le modèle hybride a été estimé non viable par des organismes tels que ScienceEurope. Cette solution est source d’une grande confusion sur la notion de « gold open access » et l’on voit apparaître aujourd’hui la notion de « fair gold » qui correspond à la publication dans des revues alternatives telles qu’imaginées lors de la déclaration de Budapest, en opposition au « gold » qui correspond aux revues hybrides crées par les éditeurs et les sociétés savantes.

Pour un historique plus complet, on peut se référer au chapitre « Archives ouvertes, 15 ans d’histoire » écrit par Hélène Bosc en 2005 [BOSC2005].

Les politiques

Les déclarations de Berlin, en particulier celle de 2005 qui a vu la reconnaissance de l’obligation de dépôt au niveau universitaire, ont constitué les premières étapes de la mise en place de politiques institutionnelles.

Afin de répondre aux obligations fixées aux signataires de la déclaration de 2005, certaines universités pionnières ont mis en place des obligations de dépôts pour leurs chercheurs, textes souvent dénommés « mandat ». Ainsi, Harvard et l’Université de Southampton ont été parmi les premières universités à adopter de telles politiques volontaristes. Par le mandat de modèle Harvard, les chercheurs donnent à « l’institution le droit non exclusif et irrévocable de diffuser leurs articles scientifique pour tout usage non commercial ». Le mandat de l’Université de Southampton est différent puisqu’il oblige les chercheurs à déposer leurs publications sur le site en les mettant en accès ouvert si la politique de l’éditeur l’autorise. Ces mandats pionniers ont été suivis de nombreux autres et l’on compte, en juillet 2014, 219 mandats institutionnels sur le site ROARMAP[11].

Les années 2010 ont vu, après la prise de conscience par les bibliothèques et les institutions, la mise en œuvre de politiques gouvernementales. Celles-ci sont en général basées sur l’argument pragmatique qu’une science financée sur des fonds publics et donc par les contribuables doit être mise en accès gratuit pour ces mêmes contribuables, contribuant ainsi, d’une part à la diffusion des résultats scientifiques, d’autre part à leur réutilisation facilitée par les petites et moyennes entreprises. Le libre accès aux résultats de la recherche scientifique « permet de mettre les résultats de la recherche à disposition de tous et facilite la participation de la société » [REC2012], argument fort qui a initié dans plusieurs états européens la mise en œuvre des politiques d’obligation de dépôt.

Ce mouvement important vers le green open access aux Etats-Unis, Allemagne, Italie, Espagne, Australie, Grande-Bretagne va de pair avec un développement des archives ouvertes dont 2600 sont référencées sur le site OpenDOAR[12] en juillet 2014.

Quelques pays ont néanmoins adopté des politiques qui privilégient le financement des articles en gold open access : la Grande-Bretagne dans un premier temps, avec le rapport Finch en 2012, suivi en 2013 d’une avancée vers la voie verte avec la politique du Research Council (RCUK). La Norvège finance en partie la voie dorée par l’intermédiaire de son Conseil de la Recherche.

Parallèlement, se sont développés des moteurs de recherche mutualisés qui moissonnent les archives ouvertes et proposent une interface de recherche unique. C’est le cas du moteur OpenAire établi dans le cadre d’un projet européen. On constate néanmoins que ces moteurs ont du mal à trouver leur public du fait de la prééminence auprès des chercheurs de l’utilisation du moteur de recherche Google Scholar.

Cette problématique est une de celles adoptée par l’association « Confederation of Open Access Repositories » (COAR)[13] qui structure les porteurs d’archives ouvertes. Un des objectifs de cette association est d’harmoniser les métadonnées des archives ouvertes afin de les rendre plus sûrement moissonnables et interopérables. Après la création des premières archives ouvertes, leur normalisation, le travail sur leur interopérabilité, la prochaine étape de développement serait alors leur mise en réseau distribués.

Archive ouverte : définition, état des lieux

Comme on l’a vu précédemment, l’accès ouvert a d’abord été une affaire de chercheurs dont la réalisation s’est concentrée autour d’initiatives thématiques telles qu’ArXiv et Cogprint. C’est quand la crise des périodiques s’est avérée de plus en plus prégnante, au début des années 2000, que la problématique est devenue celle des bibliothécaires, qui sont alors devenus partenaires, voire même prescripteurs, dans le processus.

Reprenons une partie de la définition d’une contribution au libre accès, rédigée lors de la déclaration de Berlin, en octobre 2003 : « 2. Une version complète de cette œuvre, ainsi que de tous ses documents annexes, y compris une copie de la permission définie dans ce qui précède, est déposée (et, de fait, publiée) sous un format électronique approprié auprès d’au moins une archive en ligne, utilisant les normes techniques appropriées (comme les définitions des Archives Ouvertes [Open Archives]), archive gérée et entretenue par une institution académique, une société savante, une administration publique, ou un organisme établi ayant pour but d’assurer le libre accès, la distribution non restrictive, l’interopérabilté et l’archivage à long terme. »[14]

Cette définition a plusieurs conséquences : les dépôts institutionnels sont des collections numériques de « résultats originaux de la recherche scientifique » produits au sein d’une université ou d’un organisme de recherche. C’est sur les caractéristiques de ce type de dépôts, uniquement orientés vers les résultats de la recherche, que nous mettons l’accent dans ce chapitre. Nous ne traitons pas des dépôts de thèses et autres documents (travaux d’étudiants, documents administratifs) dont les problématiques sont différentes, car n’impliquant pas le processus de communication scientifique. Par ailleurs, cette définition insiste sur l’importance de faire porter les sites de dépôts par des institutions qui assurent le respect des normes techniques et l’archivage à long terme. Les dépôts des publications par les chercheurs sur leurs sites personnels ou de manière non formalisée sur leurs sites de laboratoires ne rentrent pas dans cette définition et ne seront donc pas à promouvoir auprès des chercheurs.

Si l’auto-archivage des publications dans des répertoires institutionnels permet l’inventaire et la diffusion des publications, il doit également assurer leur préservation : celle-ci ne doit pas être laissée au libre choix d’éditeurs privés, d’autant plus que ceux-ci proposent de plus en plus des modèles économiques de ventes de licences d’accès plutôt que d’achat de contenus. On peut ainsi penser que la préservation n’est pas leur priorité. En France la mission de préservation est assurée par le Centre Informatique National de l’Enseignement Supérieur (CINES) qui archive pour préservation l’archive mutualisée HAL (Hyperarticles en ligne). Dans d’autres pays, cette mission est assurée par la Bibliothèque nationale, c’est le cas par exemple en Suède.

Le paysage français de l’accès ouvert est original car structuré autour de la plate-forme nationale HAL. Suivant les termes du protocole de 2006, suivi de la convention de partenariat signée en avril 2013 par les conférences des présidents d’universités et de grandes écoles et les grands organismes de recherche, la politique française en matière d’archives ouvertes est ainsi structurée autour du « développement coordonné des archives ouvertes sur la base du développement de la plate-forme mutualisée HAL et de son interconnexion avec les archives institutionnelles des établissements partenaires ». Les établissements font donc face au choix de se doter d’un portail HAL qui est une « entrée spécifique, permettant de mieux identifier une institution, une discipline, un congrès etc… ». Les documents déposés se retrouvent alors dans la base mutualisée HAL. Ils peuvent aussi se doter d’une archive ouverte sur une plate-forme indépendante de HAL avec éventuellement un reversement de leurs dépôts (métadonnées et/ou fichiers) dans la plate-forme mutualisée HAL. Nous verrons plus loin comment les bibliothèques peuvent participer à ce choix, voire même être prescripteurs sur certains critères.

Les bibliothèques, en tant que porteurs des projets d’archives ouvertes, ont ainsi à répondre à un double défi : d’un côté, rendre le processus de dépôt le plus simple possible afin qu’il soit pris en main facilement par les chercheurs. D’un autre côté, assigner aux dépôts des métadonnées la meilleure qualité possible afin qu’ils soient visibles, ce qui demande beaucoup de temps et d’efforts. Souvent, la facilité de dépôt a été privilégiée au détriment de la qualité des métadonnées, nuisant ainsi à l’interopérabilité des sites de dépôts.

Implication des bibliothèques

Dans ce contexte, les bibliothèques devront mettre en œuvre un éventail de compétences afin d’être moteurs pour l’accès ouvert dans leur établissement. Les résultats de l’enquête réalisée en 2012 par le consortium Couperin[15] auprès des porteurs d’archives ouvertes en France [OLL2013] ont montré que les difficultés rencontrées pour mettre en œuvre ces projets se concentrent autour de quatre points : l’implication des chercheurs en tant qu’auteurs de publications, le manque de communication institutionnelle autour du projet, le manque de moyens humains et enfin le manque de volonté politique pour porter le projet.

En premier lieu, les bibliothécaires doivent être eux-mêmes convaincus de l’importance de la diffusion des résultats de la science en accès ouvert. Ils sont souvent plus sensibilisés à cette question que la plupart des chercheurs qui vivent un modèle de publication savante à fortes contraintes, pour lequel le facteur d’impact de la revue dans laquelle ils publient est prépondérant. En conséquence les chercheurs ne se sentent pas libres de choisir de diffuser leurs publications en accès ouvert. Les bibliothécaires sont par nature très sensibles à la question car ils sont en première ligne pour négocier les prix des bouquets de revues avec les éditeurs. Ils perçoivent en général, mieux que tout autre acteur de l’établissement, les limites du modèle de publication académique actuel. La compréhension des enjeux de l’accès ouvert, des différents modèles en présence, la connaissance des possibilités de créations d’archive ouverte sont des compétences qui devront être acquises dans les bibliothèques avant tout début de projet.

Ces enjeux devront ensuite être portés auprès des chercheurs, des directions scientifiques et des instances de l’établissement. Une discussion budgétaire sur les montants d’accès aux bouquets de revues électroniques pourra être l’occasion d’initier le débat. Comment sortir de ces achats d’accès aux bouquets de revues, qui ont pris des proportions inquiétantes dans les budgets documentaires des établissements ? La transition vers le tout accès ouvert, par l’intermédiaire du dépôt de la version revue par les pairs dans un site institutionnel, est une solution à présenter. On pourra également mettre en avant la recommandation de la commission européenne du 17 juillet 2012 et l’obligation exigée des porteurs de projets H2020 de déposer leurs publications en accès ouvert [REC2012].

Politique institutionnelle

A ce moment du débat, plusieurs questions se poseront à l’établissement. Les réponses à ces questions détermineront sa politique institutionnelle en matière d’archive ouverte :

  • l’établissement souhaite-t-il se doter d’une plate-forme de dépôt des publications du site selon un modèle de green open access ? La réponse à cette question sera fondatrice ou non du lancement d’un projet d’archive ouverte. Des établissements peuvent y répondre de manière négative, en laissant aux chercheurs le soin de déposer leurs publications sur HAL, sur une autre plate-forme thématique ou sur leurs sites de laboratoires.
  • l’établissement souhaite-t-il voir sur ce site l’ensemble de la production scientifique de l’institution ? De manière plus précise, souhaite-t-il un simple signalement des publications ou un signalement accompagné du dépôt en texte intégral ?
  • l’établissement souhaite-t-il rendre le dépôt des publications en texte intégral obligatoire ? Cela peut se considérer dans une visée d’exhaustivité aidant aux évaluations et permettant une connaissance fine de la production de l’établissement. Si oui, il devra se doter d’un mandat, texte définissant cette obligation et adopté ou porté par une instance comme le Conseil académique ou scientifique.
  • quelle est la répartition disciplinaire des publications dans l’établissement ? Il faudra porter une attention particulière aux publications en sciences humaines pour lesquelles les politiques éditoriales présentent souvent des embargos de longue durée (de une à plusieurs années) et prendre en compte ces critères dans le projet.

Au cours de l’avancée du projet, vont ensuite se poser des questions organisationnelles, techniques, des questions de communication et d’information des chercheurs et bien sûr des questions juridiques.

Portages de projets d’archives ouvertes

Une fois la politique de l’établissement en matière d’archive ouverte définie dans ses grandes lignes, se pose la question de la plate-forme d’accueil de l’archive. Là encore, les bibliothèques, par leur expérience de la gestion catalographique, de l’indexation, de la manipulation de métadonnées, ont des compétences à mettre en avant pour aider au choix de la plate-forme.

Le projet d’archive ouverte est un projet informatique classique dont le déroulement dépend en grande partie du choix de la plate-forme fait en amont : la plate-forme nationale HAL ou archive ouverte institutionnelle spécifique ? Plusieurs arguments peuvent aider à faire ce premier choix :

  • quel est l’existant au sein de l’établissement en termes d’accès ouvert ? Y’a-t-il de nombreux laboratoires sous tutelle du CNRS, dont les chercheurs ont déjà l’habitude de déposer dans HAL ?
  • le projet peut-il bénéficier d’un budget ? La mise en place d’un portail HAL nécessite peu de crédits mais un investissement humain. La mise en place d’une archive ouverte indépendante nécessitera probablement un budget de prestation pour mettre en place la plate-forme logicielle ainsi qu’un coût humain plus élevé.
  • quelles sont les ressources humaines affectées au projet ? Sont-elles pérennes ou pas ? Quelle seront les ressources humaines affectées lors du fonctionnement de l’archive ?

L’ensemble de ces éléments peut permettre de guider le choix entre un portail HAL et une archive ouverte indépendante.

La durée du projet devrait être l’occasion d’impliquer les différents acteurs de l’établissement : bibliothèque, direction scientifique, directions de laboratoires, chercheurs. Ainsi, on pourra constituer un groupe de travail pluridisciplinaire qui prendra en compte les besoins des différentes composantes et essaiera d’adapter au maximum les services proposés à leurs demandes.

D’une manière plus globale, les bibliothèques devront, sur ces thématiques, travailler en réseau afin de mettre en œuvre de manière coordonnée les référentiels pertinents (pour les auteurs, les laboratoires) ou les statistiques d’utilisation. Le travail établi en France dans le cadre du projet « Bibliothèque Scientifique Numérique » (BSN)[16] va dans le sens de la coordination des initiatives.

Communication, information auprès des chercheurs

La sensibilisation des chercheurs aux concepts de l’accès ouvert et plus précisément au projet d’archive ouverte qui se met en place, prendra une part importante du temps de ce projet. En effet, ceux-ci, pris dans leur travail quotidien et souvent indifférents voire réticents aux enjeux de l’accès ouvert, ne voient pas la valeur ajoutée de l’archive ouverte et même la considèrent souvent comme potentiellement chronophage.

Tout l’art des porteurs de projets, bibliothécaires, groupe de travail, sera alors de concilier l’apport de valeur ajoutée par des services – diffusion des publications sur une page personnelle ou un site web de laboratoire, constitution automatique de bibliographies pour réponses aux évaluations… – à un programme important de formation et d’information : participation aux réunions de laboratoires, interventions en conseil scientifique, publications d’actualités sur le site web ou l’intranet, organisation de tables rondes, journées d’informations, cafés open access, tels sont les éléments qui pourront être mis en œuvre afin de sensibiliser les chercheurs. On pourra également s’intéresser aux chercheurs en devenir, les doctorants, en leur proposant des formations spécifiques dans le cadre de leur cursus doctoral.

La promotion de l’archive ouverte, à la fois en état de projet et en production, nécessitera donc de la part des bibliothèques la mise en place d’un solide bagage de communication, d’information, de sensibilisation, accompagné de diplomatie et de connaissance du sujet. Les bibliothèques devront également apprendre à connaître les pratiques spécifiques des chercheurs de leur institution en termes de publication scientifique : quels sont les facteurs prédominants qui président au choix d’une revue ? Quand l’option open access est proposée par l’éditeur sous forme d’APC payante, est-elle souscrite par les chercheurs ? L’établissement opère-t-il un recensement de ces dépenses ? Les chercheurs utilisent-ils les réseaux sociaux de la recherche ? Si oui, en font-ils un argument pour ne pas déposer leur publication sur l’archive institutionnelle ? Les débats sont vifs au sein de certaines communautés de chercheurs sur la reconnaissance même de l’existence des archives ouvertes comme moyen de comptage des publications. Si ce débat est présent dans l’institution, l’appui des instances sera utile afin de convaincre les chercheurs.

Aspects juridiques

L’une des questions les plus fréquentes des chercheurs à propos du dépôt en archive ouverte concerne le droit. Ils ont signé un contrat avec l’éditeur (souvent sous la forme d’une case à cocher lors du processus de soumission de l’article) et sont du coup persuadés qu’ils ont perdu tous leurs droits sur cette publication. La question doit être scindée en deux points distincts [BOU2013] :

Quels sont les droits de l’auteur sur les différentes versions de son article suite à la validation de celui-ci par un éditeur ? La réponse variera grandement en fonction des éditeurs. Les politiques de plus de 1600 éditeurs (chiffres août 2014) sont regroupées sur le site Sherpa-romeo. Les bibliothécaires devront aider les chercheurs à trouver cette information, soit en intégrant un appel aux informations de ce site pendant le workflow de dépôt dans l’archive ouverte, soit en opérant eux-mêmes un contrôle à priori ou à postériori du dépôt.

Quel statut juridique ont les documents déposés dans l’archive ouverte et quelle licence d’utilisation peut-on leur adjoindre ? Là encore, la réponse dépend du contrat signé par le chercheur avec l’éditeur. Si l’auteur signe une cession de droits non exclusive, il pourra adjoindre une licence Creative Commons (CC)[17] à son travail. Si l’auteur signe une cession de droits totale, il n’a pas cette possibilité. Dans tous les cas de figure, les porteurs du projet archive ouverte devront anticiper toutes les possibilités en proposant aux chercheurs la possibilité d’adjoindre une des versions de la licence CC à leur travail et en leur expliquant les différentes options qu’ils peuvent choisir.

Autres voies de l’open access

La voie green open access, soit celle du dépôt par les chercheurs de la version validée par les pairs de leur article sur des sites institutionnels, est aujourd’hui largement soutenue par des politiques nationales et institutionnelles fortes et par un réseau d’archives ouvertes toujours plus important. Néanmoins, les bibliothèques travaillent de plus en plus sur la voie dorée, en particulier en mettant en place dans quelques établissements et ceci en coopération avec les directions scientifiques, des recensements des APC financés par les chercheurs et laboratoires. Ce type de recensement est important car il permet d’avoir une idée du coût global de la publication savante dans un établissement, à la fois en termes d’accès et de publication. Connaître les articles publiés en hybride peut également permettre aux bibliothécaires de sensibiliser les chercheurs aux contraintes de cette solution.

Données de la recherche

Si les archives ouvertes sont actuellement en plein développement en France, c’est pour mieux préparer le prochain grand chantier qui s’ouvrira aux bibliothèques, celui de la mise en accès ouvert des données de la recherche. Les préconisations pour aller dans ce sens existent déjà au niveau du programme H2020 de la Commission Européenne. Certains pays ont largement avancé sur ce sujet, en particulier la Grande Bretagne avec les travaux du JISC[18]. En France, peu de bibliothèques académiques se sont lancées sur cette voie. L’INRA fait figure encore une fois de précurseur. L’idée, pour Odile Hologne, responsable de l’Information Scientifique et Technique à l’INRA est que la prise en main de cette fonction par les personnels de l’Information scientifique et technique se fasse par l’intermédiaire de ce qui fait ou doit faire partie de leurs compétences actuelles et à venir, à savoir la gestion des métadonnées et des référentiels [HOL2013].

Conclusion

L’accès ouvert aux informations issues de la recherche représente un enjeu important du processus de recherche. Pour les bibliothèques académiques, un ensemble de compétences techniques, organisationnelles et de communication est à mettre en œuvre. Si quelques compétences techniques spécifiques peuvent être nécessaires pour certains projets, la majorité des compétences sont familières aux bibliothèques puiqu’elles concernent la promotion de l’accès ouvert auprès des utilisateurs, chercheurs ou étudiants, la mise en œuvre des sites web normalisés accueillant les archives ouvertes, le travail mutualisé entre bibliothèques afin de construire des référentiels et infrastructures coordonnés, le rôle de conviction auprès des instances visant à mettre en place des politiques adéquates.

Ce travail passionnant a pour objet la mise en œuvre de l’archive ouverte institutionnelle qui sera à l’avenir l’épicentre de l’accès ouvert dans un établissement. D’une part, parce que ce site ou ses « descendants » sont ceux qui accueilleront les sets de données de la recherche et leurs métadonnées adéquates. D’autre part, parce qu’on peut penser que l’avenir de la publication scientifique est là, dans un processus de revue par les pairs renouvelé au sein de revues soutenues par des fonds publics et hébergées par des établissements ou des regroupements d’établissements. Les archives ouvertes seraient alors l’amorce d’une évolution des bibliothèques académiques vers des fonctions éditoriales renouvelées.

Ceci ne pourra se faire qu’au travers d’interactions de plus en plus étroites entre les bibliothécaires et les chercheurs, qui doivent avancer ensemble pour atteindre cet objectif d’un accès ouvert à tous aux résultats de la recherche.

Notes

[1] L’expression « accès ouvert » est utilisée pour remplacer et traduire « open access ».

[2] L’expression « bibliothèque académique » est utilisée comme traduction littérale de l’anglais « academic library » pour décrire les bibliothèques des établissements d’enseignement supérieur quels que soient leur statut.

[3] Toutes les réferences sont citées en fin d’article.

[4] SPARC : Scholarly Publishing and Academic Research Coalition.

[5]. ArXiv : physique, mathématiques, informatique http://arxiv.org/- Cogprints : sciences cognitives http://cogprints.org/ – RePEC : économie : http://repec.org/

[6]. Pubmed central : médecine, sciences de la vie, National Library of Medecine, USA http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/

[7] eDoc : archive ouverte de l’Université Humboldt, Berlin http://edoc.hu-berlin.de/

[8] Scielo : Scientific Electronic Library Online, Brésil : http://www.scielo.org

[9] Voir http://www.opendoar.org/

[10] Voir http://www.sherpa.ac.uk/romeo

[11]Voir http://roarmap.eprints.org

[12]Voir http://www.opendoar.org

[13]Voir https://www.coar-repositories.org

[14] Déclaration de Berlin sur le libre accès http://openaccess.inist.fr/?Declaration-de-Berlin-sur-le-Libre

[15] Voir http://www.couperin.org

[16] Voir www.bibliothequescientifiquenumerique.fr

[17]Voir http://creativecommons.fr

[18]Voir http://www.jisc.ac.uk

Bibliographie

[BOS2004] Bosc, Hélène. Pour une plus grande visibilité des travaux des chercheurs : l’exemple de l’archive ouverte PhysiologieAnimale http://phy043.tours.inra.fr:8080 [consulté le 27 août 2014]. http://halshs.archives-ouvertes.fr/sic_00497213/

[BOS2005] Bosc, Hélène. Archives ouvertes : quinze ans d’histoire. In : Les archives ouvertes : enjeux et pratiques :  guide à l’usage des professionnels de l’information  / sous la direction de Christine Aubry et Joanna Janik  ; [préface de Laurent Romary] Paris  : ADBS , 2005.

[BOU2013] Bouvier, Stéphanie. Quelles licences de diffusion pour une archive ouverte institutionnelle, novembre 2013 [consulté le 27 août 2014]. http://blog.univ-angers.fr/projetao/2013/11/27/quelles-licences-de-diffusion-pour-une-archive-ouverte-institutionnelle/#.U8UzPEA39rZ

[HOL2013] Hologne, Odile. Données de la recherche : rôle des professionnels IST à l’Inra. Presenté au 43e congrès de l’ADBU, Le Havre, FRA, 2013 (2013-09-19) [consulté le 27 août 2014]. http://prodinra.inra.fr/record/207958

[INI2004] Initiative de Budapest pour l’accès ouvert [consulté le 22 juillet 2014] http://openaccess.inist.fr/?Initiative-de-Budapest-pour-l .

[OLL2013] Ollendorff, Christine. Enquête archives ouvertes, présentation lors des journées Couperin des 24 et 25 janvier 2013 [consulté le 22 juillet 2014]. http://couperin.sciencesconf.org/

[POY2014] Poynder, Richard. Interview wiht Kathleen Shearer, executive director of the Confederation of Open Acess Repositories, 2014 [consulté le 27 août 2014]. http://poynder.blogspot.co.uk/2014/05/interview-with-kathleen-shearer.html

[REC2012] Recommandation de la Commission du 17 juillet 2012 relatif à l’accès aux informations scientifiques et à leur conservation [consulté le 22 juillet 2014]. http://ec.europa.eu/research/science-society/document_library/pdf_06/recommendation-access-and-preservation-scientific-information_fr.pdf

[SOL2012] Solomon, David J and Björk Bo-Christer. A study of open access journals using articles processing charge, 2012 [consulté le 1er septembre 2014] http://www.openaccesspublishing.org/apc2/

[WAL2013] Wallon, Amandine. De l’intérêt des bibliothèques nationales pour l’Open Access. Bulletin des bibliothèques de France [en ligne], n°6, 2013 [consulté le 27 août 2014]. Disponible sur le Web : <http://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2013-06-0020-003>. ISSN 1292-8399.

Pour aller plus loin :

Burpee K. Jane and Fernandez Leila. Scholarly Communication at Canadian Research Libraries : conversations with Librarians [consulté le 27 août 2014].http://jlsc-pub.org/jlsc/vol2/iss2/3/

Harris, Sian. Moving towards an open access future : the role of academic libraries : a report of a roundtable commissioned by SAGE in association with British Library, August 2012 [consulté le 27 août 2014]. http://www.uk.sagepub.com/repository/binaries/pdf/Library-OAReport.pdf

Kern, Brian and Wishnetsky, Susan. Adopting and implementing an open access policiy : the library’s role. Serials Librarian, vol 66 n° 1-4, 2014. DOI:10.1080/0361526X.2014.880035

Suber, Peter. Open access. MIT Press, 2012. [consulté le 27 août 2014]. http://mitpress.mit.edu/sites/default/files/titles/content/9780262517638_Open_Access_PDF_Version.pdf

La gestion de projet ou comment je n’en fais plus

Travaillant en école d’ingénieurs, j’ai très vite été sensibilisée puis formée à la gestion de projet comme moyen efficace de soutenir l’avancée d’un projet durant ses différentes étapes, de l’idée au recueil de besoins et à la mise en production. J’ai ainsi mené à bien le projet d’ENT de notre établissement, puis piloté le projet d’archive ouverte SAM. J’ai toutefois toujours été surprise de la rigidité de la méthodologie de gestion de projet : planification, management, jalonnement… Si j’avais suivi à chaque fois les étapes requises de reporting, si je m’étais perdue dans la rédaction de beau diagrammes de Gantt ou dans une gestion documentaire hyper pointue, je pense que j’y serai encore ou que les projets n’auraient pas aboutis.

Finalement, c’est en étant constamment souple et réactive devant les différents aléas qui survenaient que j’ai pu faire avancer les choses. En gros, j’ai toujours eu l’impression, quand j’en faisais, de passer plus de temps à faire de la gestion de projet qu’à gérer le projet proprement dit. Loin de moi l’idée de dire que la gestion de projet n’est pas efficace, je pense juste qu’elle n’est pas adaptée aux petits projets que nous avons à gérer mais plutôt à de grands projets industriels.

Pour des projets tels que les nôtres, il faut un peu de rigueur, le sens de la négociation énormément de sens pratique et surtout beaucoup d’agilité, de capacité d’adaptation et un savoir béton de gestion de calendrier. J’entends cela pour des projets tels que la refonte d’un site web de bibliothèque ou la mise en place d’une archive ouverte : projet à l’échelle d’un ou quelques établissements, avec des ressources humaines modestes (2 à 5 personnes) et des besoins matériels limités.

De plus en plus ces temps-ci, je m’appuie même sur le travail en tout petit groupe, ce qui me confirme par comparaison la lourdeur de la gestion de projet. Une étude est sortie récemment disant qu’un petit groupe (7 à 10 personnes) prend de meilleures décisions qu’un grand.  Animant un réseau de 10 bibliothèques, j’ai eu l’occasion de constater cela de nombreuses fois.

Depuis quelques temps j’ai franchi une étape supplémentaire en expérimentant le travail en groupes de 3 à 4 personnes : cela permet d’être hyper efficace sur la gestion du calendrier (on trouve plus facilement une date à 3 qu’à 10), de faire des réunions courtes, avec la participation complète de tout le mini-groupe à toutes les réunions. On obtient ainsi une grande pertinence de travail. Si les 3 personnes connaissent bien le sujet sur lequel on travaille, on avance rapidement et de manière très motivante. Nous avons ainsi réalisé à 3 personnes le plan de formation des 25 collègues de notre réseau documentaire en 3 réunions téléphoniques d’une heure. Le nombre 3 permet d’une part d’éviter le renvoi de balle entre deux personnes qui ferait tourner en rond la discussion et d’autre part d’obtenir une richesse suffisante de contributions. Bien sûr, le travail du mini-groupe doit ensuite être validé sur un groupe moyen mais cela se fait facilement et beaucoup plus rapidement que si l’on avait dû traiter le point à dix personnes.

Donc, comprendre la gestion de projet pour mieux ne pas en faire et appliquer l’adage small is beautiful…

Enquête ITHAKA : visions, opportunités et contraintes pour les directeurs de bibliothèques académiques

L’Ithaka a récemment publié les résultats de son enquête 2013 auprès des directeurs de bibliothèques académiques américaines.

Odysseus in Ithaka
By Karl Mickel [Public domain], via Wikimedia Commons

L’enquête a été envoyée à l’automne 2013  au directeur ou au doyen des bibliothèques universitaires américaines (du niveau « baccalaureate college » au niveau « doctoral university ») et a donné lieu à 499 réponses.

Voici une traduction du résumé de l’enquête et de sa conclusion (pardon à l’avance pour les erreurs de traductions, j’espère ne pas avoir fait trop de contre-sens).

« Principales conclusions :
Ce cycle de l’enquête illustre des différences importantes chez les dirigeants des bibliothèques universitaires selon leur type d’institution.  La vision des collections, des services et du positionnement organisationnel diffère notablement selon les catégories d’établissement. Bien qu’il y’ait également beaucoup de similitudes, cette diversité apparaît être une caractéristique majeure et probablement en croissance pour cette communauté.

Sur la vision et la stratégie :

. A l’unanimité presque complète, les directeurs de bibliothèques montrent un fort engagement dans le rôle que leurs bibliothèques jouent dans l’enseignement aux littératies informationnelles pour les étudiants de niveau licence. Cet alignement fort des bibliothèques académiques autour de l’enseignement et de l’éducation en licence pourrait avoir des implications à long-terme sur leur manière de prioriser leurs autres fonctions.

. Hormis dans les universités de niveau doctorat, on constate une baisse importante de la part de répondants investis dans le rôle de soutien à la recherche.

. Comme en 2010 (date de la précédente enquête), seule une minorité de répondants affirme que leur bibliothèque dispose d’une stratégie adaptée aux besoins changeants des utilisateurs. Les répondants dont les bibliothèques collectent des indicateurs et des évaluations sont plus facilement confiants dans leur stratégie pour répondre aux besoins des utilisateurs.

Sur le management et les contraintes
• Le rôle des directeurs des bibliothèques au sein de leur institution varie largement, avec des directeurs de grandes institutions beaucoup plus susceptibles de se sentir faisant partie de l’administration « senior » que ne le sont les autres directeurs.

Les patrons des directeurs sont moins susceptibles de soutenir toutes les fonctions de la bibliothèque que les directeurs eux-mêmes. L’écart est particulièrement prononcé dans deux domaines : le rôle de conservation et d’archivage en dehors des universités de recherche, suggérant de possibles tensions entre les valeurs exprimées par la profession et les priorités des petites universités de moins forte intensité de recherche ;  et le rôle de soutien à l’enseignement dans les institutions de niveau doctorat, où les dirigeants des bibliothèques semblent avoir moins d’appui institutionnel pour apporter des ressources sur les besoins de premier cycle que dans d’autres établissements.

Sur les collections et les formats 
• Une minorité de répondants, même dans les établissements de niveau doctorat, estime qu’acquérir des livres imprimés pour bâtir des collections niveau recherche est important. Par ailleurs, une large majorité pense que la construction de collections locales imprimées a décliné en importance. En comparaison, la grande majorité des répondants considère le partage des ressources comme fonction importante d’une bibliothèque et il ressort comme une évidence auprès de tous les types d’institutions de l’importance d’une approche collaborative pour répondre aux besoins informationnels des utilisateurs.

• Concernant les revues, le passage de l’imprimé à l’électronique est, en termes d’allocations budgétaires, pratiquement terminé. Les directeurs de bibliothèques ont tendance à être plus à l’aise que ne le sont les membres du corps professoral sur la transition du papier au numérique pour les revues scientifiques.
• Le changement de format des livres imprimés aux ebooks semble se produire à un rythme plus mesuré, avec une projection relativement faible de la hausse des dépenses pour les ebook. La vision de l’importance des ebook dans les bibliothèques n’a pas changé de manière mesurable ces trois dernières années.

Le budget et les effectifs
• La limitation des ressources financières représente une contrainte majeure pour les directeurs de bibliothèques. Beaucoup d’entre eux sont d’accord sur la façon dont ils dépenseraient de nouveaux crédits, s’ils étaient disponibles : en même temps que les effectifs,  investir plus dans les contenus online ou numériques, à la fois revues et ebooks, est d’un fort intérêt pour tous les types de bibliothèques. D’autres domaines, tels que l’augmentation des effectifs pour la mise en place de dépôts ou de services d’aide à la publication pour les chercheurs sont plus prioritaires pour les établissements de niveau doctorat.

• Les réponses des directeurs des bibliothèques mettent en évidence la continuelle et peut-être grandissante importance du personnel par rapport aux autres grandes catégories de dépenses. Beaucoup de directeurs sont préoccupés par la capacité limitée en compétences et en personnels et dépenseraient de nouveaux budgets pour de nouveaux postes ou pour des augmentations de salaires pour les personnels existants.

• De nouvelles embauches devraient se concentrer dans les secteurs émergents et en croissance comme les services web , la conservation numérique , les services de littératie informationnelle, la conception de ces services. Une baisse serait prévue dans des domaines plus établis tels que les services de références, les services techniques et la gestion des collections imprimées.

Les premier cycle et la littératie informationnelle
• La quasi-unanimité dans le sentiment que l’enseignement des compétences de recherche et de maîtrise de l’information pour les  premier cycle est une fonction importante des bibliothèques se reflète dans la confiance généralisée des directeurs que c’est principalement de la responsabilité de la bibliothèque de favoriser ces compétences. Les membres du corps professoral ont une vision plus contrastée du lieu de prise en charge de cette responsabilité.

• Deux services essentiels pour les premier cycle ressortent avec une même importance :  «proposer un enseignement de recherche documentaire aux classes de premier cycle» et «fournir des espaces pour le travail collaboratif des étudiants ». Les autres services de soutient à l’enseignement n’atteignent pas le même degré d’importance.
• Pour les établissements qui fournissent des cours en ligne, une part importante de directeurs ne pense pas que leurs bibliothèques sont bien préparées à fournir un soutien aux étudiants dans ce domaine.

Conclusion
Le cycle 2013 de cette enquête a mis en évidence d’importants changements dans les bibliothèques académiques depuis les trois dernières années. L’attitude des directeurs de bibliothèques envers les collections imprimées est en train de changer, avec des répondants accordant moins d’importance à la constitution de collections. Le soutien à la recherche change, avec beaucoup de répondants décrivant de nouveaux services innovants pour les chercheurs, malgré un déclin de la valeur accordée à cette fonction. Dans le même temps, de plus en plus de directeurs voient un rôle fort de leur bibliothèque dans l’enseignement des compétences informationnelles pour les premier cycle.

Les résultats suggèrent des domaines qui mériterons d’être suivis dans les années à venir. Ainsi, la pénétration générale du marché par les services de découverte, à combiner avec un notable changement de l’attitude des répondants sur les stratégies de recherche, suggère qu’il s’agit d’un domaine de changement intéressant.

Il pourrait y avoir des changements intéressants concernant la transition de format pour les livres, spécialement si l’on prend en compte les réelles divergences de vue entre les directeurs de bibliothèques et les chercheurs.

Finalement, les efforts des répondants pour augmenter les effectifs, combinés avec leurs préoccupation sur le niveau des emplois et les compétences des personnels, indique que les bibliothèques académiques vont continuer à faire face à des problèmes de ressources humaines durant les prochaines années.

Dans la prochaine enquête, prévue en 2016, nous espérons suivre ces points et d’autres tel que la confrontation des établissements d’enseignement supérieur et de leurs bibliothèques aux changements stratégiques. »

Voir ici pour plus d’informations et de détails sur les résultats.

On voit finalement que les directeurs de bibliothèques académiques américains ont des problématiques similaires aux nôtres que ce soit au niveau des ressources humaines ou des restrictions budgétaires. Ils semblent avoir largement franchi le pas du numérique, en accordant de moins en moins d’importance aux collections papier, ce que j’ai pour ma part fait depuis longtemps, intellectuellement du moins. Dans les bibliothèques de mon établissement, cela est suivi d’effet pour les collections recherche, qui sont dorénavant entièrement numériques. Beaucoup moins au niveau des collections de niveau L et M pour lesquelles l’offre en e-book est pauvre et peu adaptée à nos usages.

Une différence notable entre les américains et nous me semble venir du soutien à la recherche qui apparaît déjà comme une fonction moins stratégique aux directeurs, probablement parce qu’elle est déjà rentrée dans les tâches quotidiennes. Sur cet aspect, les bibliothèques académiques en France sont encore en mode projet, avec la mise en place d’archives ouvertes et la communication vers les chercheurs sur l’accès ouvert aux publications scientifiques.

Quant au point sur la littératie informationnelle des étudiants de niveau licence, il apparaît justement très fortement en ce moment, à l’heure de l’augmentation du travail autonome et de la diminution des heures de cours en présentiel, comme faisant partie des missions des bibliothèques.

Bibliothèque académique, organisation apprenante

Il y’ a quelques années je m’étais déjà essayée à l’exercice (p. 33) de définir ce qu’est une bibliothèque académique. L’idée est d’adresser les bibliothèques des établissements Nuage_tags_complexe. Wikipediad’enseignement supérieur, qu’ils soient universités, grandes écoles ou autres parce que leurs problématiques sont identiques même si bien sûr affectées par des variants disciplinaires ou de taille (public, fonds).

Dans ce billet, je voudrai plus particulièrement m’attacher à les re-considérer comme des organisations, permettant en cela de leur attacher quelques concepts relatifs à la théorie des organisations.

Les bibliothèques académiques sont :

– des organisations, systèmes complexes que l’on peut interroger par la théorie de l’auto-organisation (p. 13), c’est à dire par sa capacité à faire émerger de l’organisation résultante des activités de ses acteurs, au sein même de l’organisation et en liaison avec leur environnement. Partir de ce postulat, c’est interroger différemment les bibliothèques académiques, en considérant que c’est leur instabilité même qui permettra l’innovation. Plus le système sera rigide, fermé sur lui-même, moins il sera innovant. Plus le système expérimentera, s’autorisera l’auto-apprentissage par l’échec, par l’instabilité, plus il sera capable de renouvellement.

– des organisations apprenantes selon la définition de Peter Senge dans « La cinquième discipline » reprise ici par Albino Amato :

« L’organisation apprenante, si on s’en réfère à Peter Senge du Massachusetts Institute of Technology (M.I.T.) qui fut le berceau de la cybernétique, c’est celle qui pratique les cinq disciplines suivantes :
1. La pensée systémique, qui permet d’avoir une vision plus large et de prendre du recul par rapport aux situation immédiates souvent trop absorbantes. Cette approche permet de comprendre en quoi des faits séparés dans l’espace et le temps peuvent être intimement liés par une série de boucles de rétroaction. Elle permet enfin de doter les différents acteurs d’un langage commun pour évoquer les structures sous-tendant les événements ponctuels.

2. La maîtrise personnelle qui implique à la fois un haut niveau de compétence dans sa fonction et la capacité de voir objectivement la réalité tout en répondant aux aspirations les plus élevées de chacun.
3. La remise en cause des schémas mentaux. À la fois des siens propres, ce qui est un des éléments de la maîtrise personnelle et ceux de l’organisation dans son entier. Beaucoup de comportements, individuels et collectifs, prennent racine sur des modèles mentaux inadéquats ou archaïques.
4. La vision partagée, qui est tout à fait différente du « projet d’entreprise » ou du « projet d’établissement ». C’est la discipline qui transforme les projets personnels en projets partagés s’appuyant sur une vision commune de l’avenir de l’organisation.
5. L’apprentissage en équipe, dont l’objectif est l’émergence d’une synergie qui rend l’équipe plus intelligente que la somme des intelligences de ses membres. Elle prend appui sur une communication transparente et la pratique d’un dialogue sain et constructif. »

Bien, voilà une feuille de route organisationnelle intéressante. Donc, si je prends ma casquette de directrice de bibliothèque académique et que j’essaie de manager au mieux cette organisation, je dois apprendre à :

– « avoir une vision plus large, prendre du recul par rapport aux situations immédiates » : la bibliothèque académique s’inscrit dans un temps long, celui de l’établissement dans lequel elle évolue. En général, nos établissements sont des structures pérennes, du moins à l’échelle d’une vie de bibliothécaire. Nous devons donc construire une organisation qui soit à la fois pérenne, stable mais aussi capable de s’inscrire dans un environnement innovant, mouvant, en fluidité continuelle.

Voilà pourquoi je dois m’attacher à construire un catalogue le plus normé possible, ce qui le rendra indépendant de l’évolution technologique qui ne manquera pas d’arriver tous les 3 ou 4 ans ; à proposer aux chercheurs une offre de ressources scientifiques payantes tout en promouvant l’open access par la constitution de sites adéquats, normés eux aussi ; à considérer, puisque nous allons vers une économie de la connaissance, que l’acquisition par nos étudiants d’habiletés numériques et de la capacité de faire évoluer celles-ci dans le temps  est un élément majeur de leur formation ; à faire évoluer au gré des usages de nos publics, le lieu bibliothèque vers plus de modularité, de variété, permettant  à la fois de répondre aux besoins d’aujourd’hui : travail en groupe, animations, flexibilité tout en gardant un oeil sur les changements qui ne manqueront pas d’arriver demain : toujours penser au changement de demain quand on en met un en oeuvre aujourd’hui.

Cela implique concrètement que mon processus de veille environnementale doit être bien au point parce que c’est par cette fenêtre de la veille que je pourrai faire rentrer dans les bibliothèques les innovations, concepts qui l’animeront demain.

C’est grâce à cette veille, à cet position d’apprentissage permanente dans laquelle je me place, que je serai en mesure de coordonner la construction d’une vision partagée de notre avenir, de nos projets.

– « remettre en cause les schémas mentaux », vaste programme ! Notre profession a la particularité d’avoir des schémas mentaux nombreux, aussi bien chez nous, en tant que professionnels, que parmi nos publics (la bibliothèque, lieu silencieux, calme et dans lequel les professionnels « classent les livres » est un concept qui a la vie dure). L’attachement chez les collègues aux fonctions traditionnelles de la bibliothèque, en particulier le catalogage, a lui aussi la vie dure. Il ne tiendra pourtant pas longtemps devant la nécessaire évolution de nos compétences vers plus de formation, d’animation, de communication numérique. Les ressources humaines de nos structures sont limitées, elles devront donc évoluer en accompagnant les changements des bibliothèques. Sur ce point, je m’adresse peut-être plus particulièrement aux bibliothèques académiques de petites structures qui ont des tailles critiques ne leur permettant pas de tout faire et qui devront rapidement faire des choix si elles ne veulent pas devenir transparentes dans leur établissement.

Et c’est vraiment là que réside une grande part de la difficulté : apporter cette vision élargie, pour construire ensemble une vision partagée, tout en gérant, avec les mêmes mains, un quotidien fait de restrictions budgétaires, de tracas administratifs, de résistances naturelles aux changements, de rigidités hiérarchiques et statutaires.

La solution est effectivement de rendre l’équipe plus intelligente que la somme de ses membres en apportant du travail transversal enrichissant, visible, montrant les compétences des acteurs de la bibliothèque : constitution d’une nouvelle offre de livres électroniques, mise en place d’une archive ouverte institutionnelle, apport de ressources documentaires sur le site e-learning de l’établissement, mise en place d’une veille technologique… autant de projets sources de formations pour les collègues, d’auto-apprentissage des équipes, si tant est qu’ils sont réalisés sur un mode projet pas trop contraignant, mais c’est une autre histoire.

Et bien sûr, cela passe également par l’expérimentation, la curiosité continuelle : veiller, trouver de nouveaux outils, expérimenter, rater, recommencer, réussir, proposer aux publics des solutions, voire les construire avec eux.

Une organisation souple, réactive, simple, légère, j’en entends déjà dire que je rêve…

Biblio :

Christine Ollendorff.- Construction d’un diagnostic complexe d’une bibliothèque académique.- Thèse ENSAM, 1999.

R.A. Thiétard.- Management et complexité : concept et théories. Centre de recherche DMSP, cahier n° 282, 2000.

Peter Senge.- La cinquième discipline.- First Editions, 1991.

Open access et grand public : la cerise ou le gâteau ?

cherryDeux points de vue exprimés récemment par des acteurs éminents de l’open access ont attiré mon attention sur l’usage des articles scientifiques en libre accès par le grand public.

Sur son blog, Bernard Rentier évoque cet aspect dans son billet : don’t mistake the cherry for the cake :

« Hence, the debate is derailing when it comes to support Open Access on the controversial basis that the general public should have access to research results freely. The real cause to defend is that scholars whose research can benefit from the reading have free access as soon as a ‘paper’ is peer reviewed and accepted for publication. The rest is cherry on the cake. »

L’accès aux publications par le grand public serait donc la cerise sur le gâteau, un effet de bord bénéfique certes mais qui, d’après B. Rentier, n’est pas l’objectif premier de l’open access.

De même, on trouve dans « les 11 malentendus sur le libre accès » énoncés par Peter Suber dans son livre « Open Access » , décrits par Benjamin Caraco sur son blog et qui définissent ce que l’open access n’est pas :

« 10. Le libre accès n’a pas pour objectif principal de diffuser les résultats de la recherche au grand public. Tant mieux si c’est le cas, toutefois il se destine surtout à ceux qui ont besoin d’accéder à ces travaux. Dans leur écrasante majorité, il s’agit d’autres chercheurs. »

Encore une fois, le libre accès au grand public est présenté comme étant un bénéfice secondaire, « tant mieux si c’est le cas ».

D’après moi, il en va tout autrement et je pense que nous, acteurs de la diffusion de l’open access des publications scientifiques aurions tout intérêt à considérer cet aspect pour nous aider à diffuser notre bonne parole.

Pour bâtir mon raisonnement, je m’appuierai sur un fait qui relève de ma vie personnelle. Ma fille est atteinte d’une maladie neuromusculaire dégénérative. Forcément, quand quelqu’un de proche est atteint de cette sorte de saloperie maladie, vous commencez à vous intéresser aux recherches qui la concernent. Vous, que vous soyez proche de quelqu’un qui a cette maladie, ou atteint de cette maladie d’ailleurs. Puis vous discutez entre proches ou atteints, vous gagnez un peu en compétence, ce qui vous permet de mieux comprendre ce que disent les médecins. Petit à petit, vous arrivez à appréhender les différentes recherches en cours, leurs implications, les essais cliniques qui sont en préparation et comment votre famille pourrait y être impliquée. Petit à petit. Sauf si vous ne pouvez pas lire les articles parce que vous tombez sur le paywall d’un éditeur.  Je peux vous dire qu’il n’y a rien de plus frustrant, en tant que parent, quand ça vous arrive. Et là donc, la plupart des gens s’arrêtent, laissent tomber et n’auront pas accès à une information qui, au sens propre du terme, a pour eux un caractère vital.

J’évoque ici les familles et personnes concernées par des maladies génétiques rares. (n’oublions pas que cela fait déjà 3 millions de personnes rien qu’en France). Bien sûr, il est bien évident que les 3 millions de personnes en question ne feront pas tous des recherches. Mais même si on considère que 5% vont le faire, on arrive à 150 000 personnes soit environ le nombre de chercheurs en France, pas négligeable finalement.

Tiens justement, aux informations du vendredi 10 janvier matin, l’annonce d’une thérapie génique qui améliore les symptômes de malades Parkinson : une simple recherche conduit à cet article du monde, qui renvoie lui-même au résumé de l’article du Lancet, avec un magnifique paywall :

copiemurlancet

Donc, si je suis proche d’un malade Parkinson, je reste bêtement devant ce mur, sans pouvoir satisfaire ma curiosité sur cette avancée de la recherche sauf à débourser $31.50.

Et si l’on quitte le champ de la médecine, quid de l’amateur passionné qui s’intéresse à tel ou tel insecte, tel ou tel champ de l’archéologie, de l’histoire médiévale, de l’astronomie, etc ?

En bref, pouvons-nous affirmer que la curiosité du grand public pour tel ou tel sujet qui le concerne ou le passionne ne devrait être qu’un bénéfice secondaire ? Cela me fait penser, tous les bibliothécaires académiques connaissent ça, à ces profs qui vous disent : « j’emprunte ce livre de mécanique des fluides, est-ce que je peux le garder plusieurs mois, de toute façon, il est hyper spécialisé, je sais que personne n’en aura besoin ». Qui peut présumer du besoin en information de quelqu’un ? Pas moi en tout cas et j’ai toujours veillé à ne pas le faire ou le laisser faire.

Avec ce type d’arguments, nous acteurs de la diffusion de l’open access, nous plaçons dans une tour d’ivoire, dans laquelle la science serait réservée aux scientifiques et par bénéfice secondaire au grand public. On promeut l’open access d’un côté, on dépense beaucoup d’énergie pour y arriver et de l’autre, on tient un discours dans lequel les résultats publiés de la science sont prioritairement pour les chercheurs et accessoirement pour le grand public. Le tout en se disant qu’il faut faire connaître au grand public la culture scientifique.

Les résultats publiés de la science réalisée sur fonds publics sont des biens communs informationnels et nous, bibliothécaires, scientifiques, n’avons aucun droit de présumer de leur utilisation. Nous devons au contraire tout faire pour que leur diffusion au grand public soit la plus large possible, en promouvant par exemple des moteurs d’archives ouvertes tels que Base ou Core.

Commun ou pas, le catalogage ?

http://sonore.hypotheses.org/74
http://sonore.hypotheses.org/74

Il y’ a quelques jours, nous avons eu avec des collègues sur twitter un échange sur le catalogage à propos de Colodus et de ce post d’Etienne Cavalié.

La discussion montrait deux écoles : celle des collègues catalogueurs qui, en même temps qu’ils exemplarisent dans le sudoc, en profitent pour enrichir la notice livre en main, améliorant ainsi la qualité du catalogue commun.

L’autre école est la mienne, celle d’un « hiérarchique » pragmatique qui réfléchit à partir du contexte de son établissement : nous avons 9 bibliothèques dont les équipes sont constituées de 1 à 4 personnes avec une personne de catégorie A par bibliothèque et pas de personnel de catégorie B partout. Du coup, dans certaines bibliothèques, ce sont les personnels de catégorie A qui font non seulement l’exemplarisation mais aussi  l’enrichissement des notices.

Or, dans nos structures, le personnel de catégorie A est celui qui gère la bibliothèque dans tous ses aspects, qui la fait vivre dans le campus, qui organise les animations, gère le budget, les personnels, organise l’accueil des publics, les formations… Nous n’avons donc pas les moyens qu’il passe en plus du temps à cataloguer. Petit à petit, la fonction se reporte, quand ils existent, sur les personnels de catégorie B. Mais même ceux-là ont, à mon avis, mille tâche plus urgentes à faire .

Loin de moi l’idée de dire qu’on « se fout » du catalogage comme vu dans un commentaire dans le post cité ci-dessus. Bien sûr que non, et je suis la première à être intraitable sur la qualité du catalogage des documents pour lesquels nous assurons le dépôt légal, à savoir les thèses de doctorat.

Le catalogage devrait être l’oeuvre fine et patiente de ceux qui font le dépôt légal, les bibliothèques nationales par exemple. Et je dois dire que les excellents transparents d’Emilie ne me rassurent pas sur la décomplexification du système avec l’arrivée de FRBR et RDA.

Le catalogage ne devrait pas plus être l’affaire de petite structures comme les nôtre qui ont trop peu de personnels pour assurer toutes les missions de soutien à l’enseignement, la recherche, d’accueil des publics, de communication, à un moment ou la fonction bibliothèque est de mieux en mieux reconnue dans les établissements.

Mais dans ce cas là, plus besoin du Sudoc allez vous me dire. Si bien sûr, le Sudoc est un outil formidable de localisation des documents dans l’ensemble du réseau universitaire français. C’est pourquoi nous y participons, parce que nous avons des documents rares que nous souhaitons rendre visibles au plus grand nombre. Mais nous ne ferons jamais des notices de catalogage impeccables, parce que cela n’est pas notre métier, tout simplement.

Donc, oui au catalogue commun mais malheureusement pas ou peu de temps à consacrer au catalogage commun.

DirBA

DirBA ? Directrice de Bibliothèque Académique.

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Bibliothèque Académique pour reprendre une traduction littérale de l’anglo-saxon « academic library » qui n’a pas d’équivalent en France, les catégories de bibliothèques étant assimilées au statut de l’établissement dans lequel elles se trouvent : bibliothèque universitaire, bibliothèque d’école d’ingénieur…

Toutes ces bibliothèques relevant d’établissement d’enseignement supérieur ont pourtant des problématiques similaires même si les tailles d’établissements, les moyens (personnels, budgets), les contextes diffèrent. Donc, repartir du terme générique et parler intégration des bibliothèques dans les processus de formation, qu’ils soient présentiels ou en ligne, soutien des bibliothèques à la recherche par la mise en place d’archives ouvertes et de politiques de publications scientifiques, aménagement des bibliothèques comme des lieux d’accueil et de partage des connaissances.

Directrice dans une situation particulière, celle de la hiérarchie fonctionnelle des 9 bibliothèques des Arts et Métiers : plutôt une tête de réseau qu’une direction en fait mais avec entre les mains toutes les problématiques relatives aux personnels, budgets, ressources et j’en passe.

Blog, parce que le besoin se fait sentir de poser sur l’écran, de débattre peut-être de certains sujets  : organisation de nos missions, innovation et bien sûr mon dada du moment, l’open access.

Alors, bienvenue !